Avez-vous entendu parler des Soft Skills ? Ces compétences indispensables aux yeux des recruteurs, ces compétences comportementales qui priment sur les compétences techniques ? Attention, c’est un critère déterminant ! Pas de Soft Skills, pas de job… Des compétences critiques, des compétences décisives,… on ne compte plus les adjectifs !!

Et voilà comment nous créons de toute pièce un buzz autour de ce que l’on sait déjà depuis longtemps. Et si on en profitait pour sortir des clichés du marketing et parler de ces Soft Skills sous un autre angle…

Soft skills : un discours formaté

Pour ceux qui n’en auraient pas encore entendu parler et qui se demandent : « c’est quoi les Soft Skills ? », vous mettez déjà le doigt sur un premier problème : il n’y a pas de définition précise à ce barbarisme anglo-saxon. Disons que cela fait référence aux compétences comportementales des êtres humains. Celles dont vous vous servez pour vous organiser, entrer en relation, vous lever le matin, réfléchir à un problème, …

En faisant quelques recherches, vous trouverez quelques mots clefs qui se répètent : confiance en soi, créativité, proactivité, adaptabilité, esprit d’équipe, gestion du temps, motivation, gestion du stress, communication, …

A priori tous les recruteurs chercheraient donc les mêmes qualités chez un salarié, mais pourquoi donc ? Chaque poste demande-t-il les mêmes compétences humaines ? Un développeur, un agent d’accueil, un technicien de maintenance et un commercial doivent-ils faire appel aux mêmes soft skills pour réussir leur mission ?

soft skills entreprise

Si vous cherchez un peu plus loin, vous vous apercevrez que ces Soft Skills n’ont pas été sélectionnés par hasard. Vous lirez par exemple que derrière cet intérêt soudain pour les compétences comportementales, se cache une volonté de trouver des gens adaptables. Autrement dit, au pire, des personnes qui supportent le changement imposé avec le sourire, et, au mieux, des personnes qui le considèrent comme une opportunité, quel que soit le stress que cela engendre ! Vous lirez ainsi que les Soft Skills sont « ces qualités personnelles qui transforment un salarié lambda en un collaborateur efficace, agréable et entraînant pour le reste de l’équipe » [Forbes 2017].

Et voilà, comment des entreprises se prennent à sélectionner de parfaits salariés qui seront ensuite fortement encouragés à renforcer ces compétences et à les démontrer pour mériter une évolution en interne. Et grâce au buzz créé autour des Soft Skills, tout le monde sait ce qu’il a à faire pour séduire son interlocuteur RH !

Au-delà de mon regard critique sur le conformisme, je suis sûre que cela part d’une bonne intention, celle de créer une ambiance de travail saine et agréable, je peux le comprendre. Qui a envie de travailler avec des gens qui chouinent, se replient sur eux ou vous agressent ?! Personne. Seulement, c’est oublier que derrière les mots se cachent des définitions et des attentes différentes. Et c’est aussi occulter le fait qu’une personne à qui on va demander de démontrer ces qualités pour être embauchée saura très bien s’y prendre pour montrer patte blanche, certainement au détriment de sa sincérité…

definitions soft skills

Des soft skills pour plaire aux recruteurs, attention aux pièges

Je vois ainsi 4 principaux dangers à cette mise en avant excessive des Soft Skills. Tous menacent le salarié inattentif, certains menacent aussi l’entreprise aveugle.

1) Soft Skills et effet trompe l’œil

En tant que professionnel intelligent et impliqué, vous vous renseignez sur les compétences attendues, soit par les recruteurs si vous cherchez un emploi, soit par votre DRH si vous souhaitez obtenir un nouveau poste en interne. Là, vous découvrez les Soft Skills et l’importance de pouvoir démontrer votre compétence en la matière pour obtenir ce que vous voulez : un nouveau poste – ou une augmentation !

Malin que vous êtes, vous allez vous appliquer, parfois sur les conseils avisés d’un consultant, à mettre en avant vos fabuleuses compétences comportementales. Et hop, un petit paragraphe dédié sur votre CV, deux ou trois histoires préparées pour illustrer le tout. Et vous voilà prêt à convaincre quiconque que vous êtes un bon communiquant qui a confiance en lui et place l’intérêt de l’équipe avant le sien.

Si tout cela parle effectivement de vos points forts, parfait. Tout le monde sera content. Mais si, par mégarde, vous avez choisi ces qualités pour coller à l’attendu plutôt que pour refléter votre fonctionnement réel, vous risquez de le payer cher.

2) Soft Skills et termes génériques

mettre en avant soft skills« Cette entreprise recherche de la créativité, ça tombe bien, j’ai toujours mille idées à la seconde, je vais créer plein de nouveaux produits et m’éclater. » Manque de bol, quand cette entreprise vous parle de créativité, elle parle de votre capacité à proposer des solutions quand un problème se présente parce que leur ligne de production est un peu vieillotte et qu’elle engendre pas mal de soucis qualité !

Attention aux mots. Le terme Soft Skills est un fourre-tout qui ne dit rien de la représentation que votre interlocuteur s’en fait, et même s’il vous parle de confiance ou d’esprit d’équipe, il va vous falloir poser quelques questions pour savoir si cela fait référence aux mêmes comportements que ceux auxquels vous pensez.

Sans ce souci de précision, vous risqueriez de vous retrouver coincé dans un poste avec un sentiment de trahison que votre employeur ne pourrait pas comprendre.

3) « Savoir faire » ne signifie pas « Vouloir faire »

Imaginons que vous ayez effectivement développé des capacités humaines et relationnelles hors pair qui vous rendent capables de travailler en équipe de façon fluide, de terminer vos missions à l’heure, de résoudre les problèmes de manières créative, de présenter vos projets avec finesse et d’arriver le matin avec le sourire. Super !

Maintenant, imaginons que l’on vous confie beaucoup de missions - trop, que les projets sur lesquels vous travaillez finissent tous à la corbeille, que vous soyez rémunéré au lance-pierre, que vos collègues tire-au-flanc ne soient jamais rappelés à l’ordre, que votre patron ne décroche jamais un bonjour… Que se passerait-il ? Mettriez-vous en œuvre vos soft skills dans ces conditions ? Sûrement au début, parce que c’est devenu un réflexe et que vous espérez peut-être faire bouger les choses. Mais au bout de quelques mois, années, ne seriez-vous pas épuisé et brisé par les messages paradoxaux ?

soft skills confiance

C’est souvent ce qu’on entend, en tous cas, de la part de salariés en burn-out. Posséder des soft skills attrayants pour l’entreprise ne signifie pas que le contexte permette de les mettre en œuvre durablement. Et dans le type de contexte que je viens de décrire, où la quête des soft skills ressemble à du HappyWashing, le mieux est sûrement de posséder une compétence toute autre : celle de dire non et de se protéger d’un milieu toxique. Pas toujours raccord avec les attentes d’une entreprise…

4) Soft skills et injonction d’harmonie

Dans son livre « L’élément Humain », William Shutz rapporte cet exemple : un directeur donne des instructions à son équipe « Votre mission est de produire un programme d’études complet. J’attends de vous de travailler ensemble harmonieusement. Toute dispute, hostilité ou introduction d’émotions dans les discussions ne peut que vous distraire de votre but. Vous connaissez l’art du compromis. » Au final, les étudiants se sont plein du programme qui était beaucoup trop exigeant. Pourquoi ? Parce que chaque membre de l’équipe pédagogique s’est empêché d’exprimer une préférence pour telle ou telle idée. Il s’en est suivi l’acceptation de tout et n’importe quoi au détriment du résultat.

Cela illustre assez bien je trouve le fait que sélectionner des profils dont les soft skills sont similaires ne doit pas faire oublier l’importance des différences, des oppositions d’opinion et des débats, même si cela alourdit l’ambiance temporairement. Le tout, me semble-t-il, est que chacun puisse distinguer désaccord sur un sujet et rejet de l’autre.

Sans ça, nous aboutirions à des structures dans lesquelles personne n’ose s’exprimer et adopterait un comportement lisse, complètement contre-productif pour l’entreprise et frustrant pour ses membres ! D’où l’importance pour moi de différencier « formation aux soft skills » – qui permettrait à chacun d’acquérir un panel de comportements possibles en fonction des besoins de la situation, et « éducation au soft skills » qui ressemblerait à un endoctrinement pour faire entrer chaque salarié dans un moule stérilisant.

Du véritable intérêt des Soft Skills en entreprise

Bien qu’assez critique vis-à-vis des dogmes concernant les soft skills, je reste néanmoins persuadée que ces compétences comportementales peuvent être source d’épanouissement pour qui veut les développer.

Elles ont à mes yeux plusieurs avantages :

  • D’abord, bien se connaître et apprendre à se faire confiance permet de choisir une entreprise et un poste qui nous correspond, en cohérence avec qui on est. C’est aussi un bon moyen de s’affranchir du regard des autres et d’économiser ainsi beaucoup d’énergie.
  • Savoir gérer son temps est aussi un soft skill utile : équilibrer le temps consacré aux différents pans de sa vie pour se faire plaisir et se sentir vivant, être plus présent à ce que vous faites, vous sentir plus serein par rapport aux tâches à réaliser… Tout ça tend vers plus d’épanouissement.
  • Communiquer avec aisance vous facilite la vie pour obtenir ce que vous voulez et refuser ce qui ne vous convient pas de manière entendable. C’est aussi un moyen de créer une ambiance agréable et conviviale pour travailler avec efficacité. Enfin, ce soft skill là vous aide à sortir de la peur du conflit pour oser être vous-même. Pourquoi donc s’en passer ?!
  • Réguler sa motivation et son stress aide à se lever le matin avec entrain en vous protégeant également de situations nocives. C’est aussi grâce à cette compétence que vous réussissez ce que vous entreprenez et que vous en retirez un sentiment de fierté en plus d’une belle énergie !
  • Quant à l’adaptabilité, c’est pour moi le soft skill le plus polémique. A mes yeux, développer votre adaptabilité pour vous épanouir, c’est surtout vous permettre de choisir le comportement le plus approprié en tenant compte du triptyque Moi/L’Autre/IntérêtCommun. Et pas une façon d’oublier le premier facteur : « Moi ». Autrement dit s’adapter, c’est aussi savoir dire non.

Et c’est pour ces avantages là que je vous incite à développer vos Softskills. Ne le faites pas pour votre entreprise, mais pour vous, pour votre bien-être. D’ailleurs pas besoin d’une formation longue et coûteuse pour ça. En développant les 4 compétences clés que sont : la confiance en soi, la gestion du temps, la motivation et la communication, vous disposez de tout ce qu’il vous faut pour naviguer sereinement dans le monde du travail. J’en parle plus en détail ici et là:

Par ailleurs, les bénéfices pour l’entreprise, bien que rarement entendus comme tels, sont également réels. Le salarié ayant développé ses soft skills dans cette optique n’est plus un bon petit soldat mais devient un professionnel responsable qui, certes exprime des faits parfois difficiles à entendre, mais trouve aussi une véritable motivation à venir travailler pour faire évoluer son entreprise et l’amener vers la réussite. Les encadrants – qui ont bien évidemment eux-mêmes développé leurs soft skills en ce sens - n’ont alors plus qu’à nourrir cette motivation. On se retrouve ainsi dans une situation où tout le monde est gagnant.

Voilà en tous cas, pour moi, la meilleure façon de faire usage de ces compétences humaines tant recherchées. Autrement dit, encore une fois, si chacun agit pour son propre bien-être dans une dynamique globale cohérente, alors tout le monde y gagne. (cf. article « construire un monde meilleur ») :)

Au plaisir de vous accompagner dans cette démarche si le cœur vous en dit,

Annabelle pour Cap Cohérence