Dans un marché de l’emploi régi par des attentes souvent très normées en termes de profils et très extravagantes en termes de performances, l’expression « profil atypique » fascine autant qu’elle inquiète. Depuis longtemps, les recruteurs tournent autour de cet adjectif comme autour d’un totem mal défini et qui, à cause de cette absence de définition claire, représente un idéal autant qu’un repoussoir. Ainsi donc, avant de disserter sur les 1001 manières de trouver un poste lorsque l’on a un profil atypique, attachons-nous à définir le terme.

Le Larousse nous dit la chose suivante :

Atypique: Se dit d’un tissu, d’une tumeur (sic) qui diffère du type normal.

Tandis que le dictionnaire Reverso nous dit quant à lui :

Non conforme à des règles, à des comportements habituels; Exceptionnel, irrégulier, hors norme, anormal.

Le décor est planté : un profil ou une personnalité atypique est donc quelqu’un qui diffère de ce qu’on a l’habitude de voir et/ou de ce qui est communément admis, en société comme dans sa boîte. Notons que ces définitions ne se basent que sur la différence par rapport à ces règles, sans jamais tenter de caractériser l’atypique en lui-même ; ce qui est plutôt logique dans la mesure où il existe presque autant d’atypismes que d’atypiques. Mais foin de pinailleries : un atypique est donc quelqu’un qui diffère de la norme et que, par conséquent on connaît mal et appréhende mal. Le fait est que ce genre de profil est, quoi qu’on en dise, rarement avantagé socialement et professionnellement (pour ce qui nous concerne) ; Elephant man pourrait vous en toucher deux mots (que les plus jeunes googlisent).

Les profils atypiques, un OVNI sur le marché de l'emploi

Pourtant, le marché du travail, tout à son souci de politiquement correct, nous dit régulièrement raffoler des profils atypiques. Ceux-ci auraient l’avantage de penser différemment, de façon moins cloisonnée, d’apporter une fraîcheur et une originalité que les clous exactement à la taille du trou dans lequel on les enfonce seraient incapables de développer. En clair, si on a besoin de bons petits soldats, on a aussi besoin de personnalités qui dynamiteront de temps à autres le douillet conformisme ambiant, pour le plus grand bien d’organisations sclérosées par l’absence de prise de risque. La « communication corporate » (communication autour de l’image de l’entreprise en elle-même, non de ses produits ou services) s’est depuis longtemps attelée à faire passer le message : je me souviens de la page carrières de cette grande entreprise, où la politique maison en matière de recrutement était présentée de telle façon qu’on aurait presque l’impression qu’un comptable pourrait s’y faire embaucher pour devenir chef de produit. Seule la personnalité, l’envie et la capacité d’apprendre comptent, oubliez les compétences ! Inutile de dire que pris au 1er degré, un tel discours suscite en masse des vocations, la plupart du temps déçues.

Car quiconque s’est frotté de façon concrète à la problématique a pu s’en rendre compte : entre les beaux discours et la réalité, il y a un gouffre. Le profil atypique, il est bien gentil, mais personne ne sait où le mettre. Et où qu’on le mette, on a peur qu’il y mette un bazar monstre avec son expérience venue d’ailleurs et ses analyses en mode quatrième dimension. Un atypique, il faut le former à ses process. Un atypique, il faut voir en quoi, concrètement, ses forces surpasseront le temps supplémentaire qu’on lui consacrera à l’intégration. Un atypique, il faut qu’il démontre en quoi il est plus intéressant qu’un typique, et, de préférence, tout de suite.

Voilà le noeud du problème posé : on veut bien de l’atypique, mais on ne veut pas attendre avant de voir où il peut nous emmener. Et comme il est souvent très difficile d’avoir cette visibilité, on préfère tout simplement s’en passer. Dès lors, comment maximiser l’impact de son discours lors d’une recherche d’emploi lorsqu’on part avec ce boulet au pied ?

Mettre en forme sa candidature "ATYPIQUE" en dégageant une cohérence de parcours

Tout d’abord, la plupart du temps, vous recherchez certes un emploi, mais pas n‘importe lequel. Même si vous êtes ouvert, vous avez fatalement des compétences que vous avez plus utilisées que d’autres, des secteurs dans lesquels vous avez plus longtemps baignés que d’autres et ainsi de suite. L’idée est donc de partir de ces éléments et d’y faire le tri afin redonner le maximum de cohérence à votre profil. Car c’est bien ça que les recruteurs attendent d’une candidature : la cohérence. Cette cohérence est ce qui leur permet de comprendre quelque chose à votre savoir-faire : une candidature mêlant indistinctement trop d’expertises différentes leur apparaîtra indémêlable et sera inévitablement mise de côté. Il est donc excessivement important de faire ressortir une dominante de votre CV- que cela soit en termes fonctionnels ou sectoriels. Si vous avez occupé des postes en marketing dans des secteurs aussi divers que le parfum, la quincaillerie ou le thermonucléaire, attachez-vous à montrer les continuum en termes de fonctions et, le plus possible, les similitudes des pratiques marketing entre les différents secteurs afin de montrer votre adaptabilité, et que votre culture générale devienne une force. Si vous avez débuté par un poste de commercial sillonneur de routes de campagnes, puis que vous êtes allé tenter la grande aventure de gestion d’une plantation d’hévéas en Indonésie pour revenir au bercail et reprendre la gestion du restaurant familial en attendant de décrocher un job, attachez-vous à mettre en valeur le continuum entrepreneurial de votre profil, vos compétences en gestion, management qui feront de vous un Office Manager ou un Directeur de division à la vision transversale, répondant au fameux mantra « thinking out of the box » et au final sans doute aussi voire plus performant qu’un profil en mode ligne droite. Montrez vos résultats, parlez des équipes que vous avez gérées, donnez des chiffres : puisque votre expérience est un kaléïdoscope, faites ressortir les couleurs sous lesquelles vous souhaitez qu’on vous voie.

Cela ne veut pas dire que votre recherche sera facile pour autant ; cela veut dire que vous aurez dégagé une ou deux caractéristiques principales de votre profil et que, ce faisant, vous aurez aussi clarifié vos objectifs. Car à force d’être trop ouvert, on finit par ne plus savoir ce que l‘on cherche ; et cet excès d’ouverture a un impact négatif considérable sur la puissance et l’intelligibilité de notre discours.

Une recherche d'emploi peut aussi se faire de façon atypique

Il est donc important de consacrer le temps nécessaire à cette réflexion en profondeur pour optimiser au mieux votre présentation. Mais il est aussi fondamental de se consacrer le plus possible au développement d’un réseau personnel ; écumer les job boards, c’est bien, mais souvenez-vous qu’en répondant à des annonces vous serez toujours en concurrence avec beaucoup d’autres profils sans doute plus « carrés » que le vôtre. Fort heureusement, il n’y a pas que les job boards dans la vie, et le marché tend même de plus en plus à migrer vers des opportunités non formalisées officiellement mais pourtant bien réelles. Prendre contact avec des professionnels sur les réseaux sociaux, leur exposer son projet, tenter de se faire recommander, se rendre à des évènements sectoriels (salons, clubs, associations d’anciens…) vous fournira une mine d’informations exploitables qui vous permettront, le jour dit, de vous présenter face à un employeur potentiel qui aura reçu votre candidature dans une logique d’opportunité, et qui vous considérera donc dans un esprit dépouillé de mise en concurrence. Seule la qualité de la rencontre décidera de l’éventuelle collaboration. Cette tendance s’accentuant de façon très significative avec la raréfaction du CDI et la nécessaire agilité toujours plus grande des entreprises en termes de vision, de projets et de réactivité, là est votre chance ; si vous savez réseauter efficacement, alors vous saurez vous positionner au bon endroit au bon moment. Votre profil dit atypique vous y aidera forcément ; car il vous a permis de voir ce que des parcours plus carrés n’étaient pas mis en situation de voir, il vous a permis d’agrandir votre champ de vision et de voir des opportunités qu’un chemin en ligne droite ne permet pas, ou moins, de saisir. Alors profils atypiques, si je m’avance un peu en affirmant que cette époque naissante est la vôtre, il n’en reste pas moins qu’elle vous ouvre des opportunités que vous serez plus à même d’aller chercher. Alors parlons, rencontrons, échangeons- et trouvons !

En résumé, pour trouver un poste lorsque vous avez un profil atypique, il faut:

  1. Dégager les caractéristiques principales de votre profil, même si vos expériences sont très variées
  2. Définir le/les types de poste que vous visez (un ou deux, maximum 3) et préparer vos candidatures en fonction
  3. Utiliser les techniques "atypiques" de recherche d'emploi (réseautage...)

Et vous, que ressentez-vous du marché actuel envers les profils atypiques ? N’hésitez pas à laisser vos commentaires, à partager cet article sur les réseaux sociaux…et à me contacter !