Vous aimeriez bien savoir comment vous épanouir au travail... Vous avez lu une foultitude d’articles à ce sujet, suivi des dizaines de conférences, dévoré des tonnes de livres, mais voilà, rien n’y fait, vous n’avez toujours pas ce sentiment d’être bien, d’être à votre place, d’être épanoui ! Il y a pourtant plein de gens pour vous parler du sujet, pour vous donner des conseils, pour vous « raisonner », voire même pour vous culpabiliser, mais en vain.
Eh bien vous savez quoi, vous n’êtes pas seul dans ce cas ! Et je dois dire que je commence à en avoir assez de la pression exercée par les uns et par les autres au sujet de l’épanouissement.
D’un côté, les « 10 conseils révolutionnaires par ci et 5 astuces magiques par là » pour « gérer son stress », « avoir confiance en soi », « rééquilibrer vie pro et vie perso », « développer l’estime de soi », … De l’autre, les discours moralisateurs du type « ne vous plaignez pas, vous avez un travail », « acceptez donc que rien n’est jamais comme on le voudrait », et bien sûr le grand « l’entreprise n’est pas là pour prendre soin de vous ». Sans parler des explications sociologiques sur l’évolution du travail.
Au final, votre tête ressemble à un véritable champ de bataille où s’affrontent des injonctions contradictoires, et plus aucune place ne reste pour la sérénité, la joie et l’épanouissement. Seule une question s’élève du brouhaha : « Comment m’épanouir au travail ? »
Pourtant, en soi, toutes ces informations engrangées pourraient avoir un intérêt, mais jetées en désordre dans notre esprit, elles ne font que nous mener à la confusion car rien ne nous indique par quoi commencer. Alors, j’aimerais bien vous proposer une marche à suivre pour dépatouiller tout ça et sortir de l’acharnement, de la culpabilisation et de la théorisation.
Procédons par étape. Et pour commencer, redonnons un peu d’espace à votre esprit critique …
Le droit de s’épanouir au travail ou pas !
Traitons pour commencer de la tendance du « fopasplaindre & tadlachance »… Comment dire…
Je crois que c’est le discours de culpabilisation le plus improductif du siècle !! Pourquoi ? Parce que la personne que papa/maman (et toute autre figure d’autorité réelle ou fantasmée) renvoie dans ses 22 avec ce type de discours se retrouve avec deux réactions instinctives possibles :
- La soumission : « oui, tu as raison, je vais plutôt accepter mon sort et souffrir en silence tout en prétendant que j’ai de la chance même si ce n’est pas ce que je ressens et que j’aspire juste à m’épanouir. »
- La rébellion : « non, tu as tors, et je vais te le démontrer par A+B en énumérant devant toi tous les exemples dans lesquels l’être humain a bien fait de remettre en cause l’ordre établi : esclavage, droits des femmes, sphéricité de la terre, … »
Dans les deux cas, beaucoup d’énergie gâchée à combattre tantôt ses propres besoins, tantôt un modèle du monde qui n’est pas le nôtre. Alors, j’ai envie de poser une question aux personnes qui tiennent ce type de discours anti-épanouissement au travail : A quoi ça sert ?
Parce que, vu comme ça, c’est juste un combat voué à l’échec. Jamais les besoins d’une personne ne s’éteindront : elle passera plutôt son temps, au mieux, à lutter pour les satisfaire sans le montrer ; au pire, à attendre la fin de sa souffrance. Quant au rebelle, il sera tellement obsédé par le besoin de confirmer son ressenti, qu’il n’en trouvera jamais l’épanouissement sans pour autant adhérer à l’idée que c’est impossible. Bref, un vrai gâchis !
Alors, j’aimerais comprendre… qu’est-ce qui pousse ces personnes à entraver la quête d’épanouissement des autres ?
Je crois que plusieurs forces sont en jeu selon les cas :
- La peur mais pour deux intentions différentes :
o La peur que l’autre se trompe et se fasse du mal.
C’est le cas typique d’Henri, le père de Sébastien qui assiste impuissant aux fluctuations d’humeur de son fils. Son enfant pourtant adulte qui démarre un nouveau travail plein d’enthousiasme en espérant enfin s’épanouir puis qui déchante après quelques mois, et se lance à nouveau dans une recherche du job « fait pour lui ». Alors, Henri, démuni, ne trouve rien d’autre à dire que « tu devrais te satisfaire de ce que tu as » au lieu d’un constructif « je m’inquiète pour toi et je ne sais pas comment t’aider, veux-tu qu’on en parle ? ». Une petite phrase toute simple qui remettrait chacun à sa place et ouvrirait les portes de la véritable entraide, mais tellement difficile à formuler quand on n’y est pas habitué.
o La peur que l’autre agisse hors du cadre de référence.
Vous savez, Laurent, ce collègue de boulot qui vous dit « on ne va pas se plaindre quand même, on a un job ! » Pourquoi ne pas lui demander « et imaginons que je prenne le risque de changer, tu ressentirais quoi mon ami ? »
Pour beaucoup, la réponse honnête serait « de la jalousie et de la colère parce que si, toi, tu t’épanouis, alors pourquoi pas moi ? et si je me pose cette question, je devrais alors commencer à réfléchir à comment faire, et c’est trop dur ! » C’est triste, mais on a tous ressenti ça à un moment ou à un autre de notre vie, et ce n’est pas grave, il est juste utile d’en être conscient.
Pour d’autres, la réponse serait plutôt « mais…mais, ce n’est pas possible ! ». Pour ceux-là, votre comportement est inconcevable. Il constituerait une perte de repères totale pour votre interlocuteur qui verrait s’écrouler tout un pan de son modèle du monde. Au final, il y a de grandes chances pour qu’il fasse un déni de votre réalité et préfère s’inventer une autre explication à votre comportement : « je pense que sa femme le trompe et ça l’a fait disjoncter / elle est partie de ce poste pour un meilleur salaire / …». Bref, n’importe quoi pourvu que ça ne déstabilise pas sa façon de voir la « réalité » : on ne s’épanouit pas au travail, un point c’est tout.
- L’indifférence.
Eh oui, vous entendre vous demander « comment s’épanouir au travail ? » n’est pas forcément du goût de tout le monde. Les priorités des uns ne sont pas celles des autres et il est possible que vous croisiez des personnes pour qui ce questionnement n’a aucun intérêt. Songez à celui qui voit dans le travail un simple moyen de nourrir sa famille ou à celle qui a choisi ce job pour avoir du temps libre. Face à votre quête d’épanouissement, ils n’auront sûrement que des phrases bateau à vous rétorquer.
Et cette dernière option m’amène à envisager la deuxième face de la pièce : bien que vous ayez tout à fait le droit de vouloir vous épanouir dans votre travail, vous avez aussi le droit de ne pas en avoir envie !
Et à ce titre, je trouve de plus en plus insupportable les réactions stéréotypées inverses à celles décrites ci-dessus qui consistent à secouer tout quidam qui ne paraîtrait pas épanoui, à coup de « ben alors, qu’est-ce qui t’arrive aujourd’hui, on t’a volé ton sourire ? », ou « ne fais pas cette tête dis donc ! », ou encore « allez, la vie est belle ! ». Sans compter les multiples « tu devrais faire ceci » et « moi, quand ça va pas, je pense à cela »…Ça vous parle ?
Je l’ai fait pendant des années, il m’arrive encore de le faire, et pourtant, je le dis, c’est insupportable ! D’abord parce que c’est insultant de dire à quelqu’un qu’il n’a pas la mine qu’il « devrait » avoir ; ensuite parce que cela peut-être vécu comme une agression pour la personne qui vit une émotion désagréable de se voir exhorter à faire « semblant que tout va bien » ; et enfin parce que, s’épanouir ne signifie pas être épanoui 7 jours sur 7, 24h/24 ! On a aussi le droit de traverser des périodes creuses !!
Et d’ailleurs, le summum de l’aberration pour moi, ce sont les conseils pour « chasser les idées noires »… quelle ineptie ! Une idée ne se chasse pas à coup de balais ! Et l’émotion associée encore moins !! Vous êtes tracassé, vous avez un souci, et bien tant mieux, ça montre que vous êtes vivant !! Laissez un peu de temps à votre état pour évoluer et peut-être se dissiper. Si ça dure, et que l’épanouissement s’éloigne, entrez dans le vif du sujet et regardez le problème en face, votre ressenti vous indique ce que vous avez à faire, il n’y a pas à lutter.
En résumé, pour amorcer une réponse à la question « comment s’épanouir au travail ? », je vous propose de faire de la place dans votre tête pour simplement laisser vivre votre propre ressenti :
Que ressentez-vous aujourd’hui vis-à-vis de votre travail ? Et que voudriez-vous ressentir à la place ?
Vous êtes libre d’être vous-même et de tracer votre propre route, qu’elle se dirige vers l’épanouissement ou pas, qu’elle soit rectiligne ou sinueuse, peu importe, c’est votre vie, faites-en ce que vous souhaitez et prenez garde au piège de la perfection !
S’épanouir ou geindre, il faut choisir
Bien sûr, se placer dans ce rôle de pilote de sa vie peut donner le vertige. Il est parfois plus commode d’être dans une posture de plainte. Et encore une fois, pourquoi pas ! On vit encore dans un pays libre, alors si j’ai envie de passer mon temps à me plaindre, c’est mon droit – en plus d’être mon problème.
Ceci étant posé, il est plutôt contradictoire d’adopter ce type de posture tout en cherchant à s’épanouir au travail. Tout bêtement parce que « s’épanouir » est un verbe d’action et qu’il suppose donc que le sujet agisse. Et même si certains useront plus facilement du mot « épanouissement » qui peut suggérer une passivité, il n’en décrit pas moins un processus intérieur qui, pour être mis en œuvre, requiert logiquement une énergie. Or, même si cette énergie peut provenir de l’extérieur, tôt ou tard la flamme s’éteint et demande à être rallumée, ce qui fait entrer le plaignant dans une dépendance. La dépendance est-elle compatible avec votre définition de l’épanouissement ?
Avec la mienne, non. J’en viens donc à penser que la seconde étape à franchir avant de se demander « comment s’épanouir au travail ? » consiste à se demander si on est véritablement prêt à agir pour s’épanouir.
Dans les grands discours que je lis ou que j’entends sur le sujet de l’épanouissement au travail, deux grandes idées antagonistes font l’objet de sérieux débats :
- D’un côté l’idée qu’il faut lutter contre une entreprise vue comme nuisible à l’épanouissement, avec ses managers autoritaires et ses actionnaires insatiables.
- De l’autre l’idée que la vocation d’une entreprise n’est pas de prendre soin de son personnel mais de faire du profit.
Encore une fois, voilà un beau débat d’idée qui peut nous faire tourner en rond pendant longtemps. Mon point de vue sur ce sujet consiste à penser que les deux assertions ont certainement leur part de vérité mais qu’on s’en fiche un peu ! Après tout, en quoi ça nous aide à nous épanouir de statuer sur ces idées ? En rien. Et je crois que nous y gagnerions tous à sortir de ces combats de vérités pour nous diriger plutôt vers ce qui nous est utile. Autrement dit, arrêtons de penser et passons à l’action.
Vous vous dites, oui oui, c’est évident. Ces débats vous paraissent lointains. Tant mieux. Mais songez à cette personne qui passe son temps à se plaindre du manque de reconnaissance de son manager et qui, dans sa vie personnelle, consomme à tout va les échantillons gratuits et autres prestations offertes sans même un mot de remerciement pour la personne qui l’accueille... Ça vous paraît plus proche ? L’incohérence est partout et nous ne la percevons pas, même quand elle est en nous. Pourtant, si on veut s’épanouir au travail - comme ailleurs - nous devons commencer par agir, et par agir en cohérence avec nos valeurs.
Tous. Chacun à notre niveau.
Une entreprise, c’est quoi ? C’est un ensemble d’êtres humains qui travaillent ensemble vers un but commun. Si ce but ne revêt aucun sens pour vous, cela ne vous empêche en rien de donner un sens à ce que vous faites, de faire vivre vos valeurs au quotidien en agissant dans le sens de ce qui compte pour vous.
Pour résumer, bien qu’il puisse être passionnant de débattre sur le bien-être en entreprise, pour tendre vers l’épanouissement au travail, il me semble surtout utile de se placer dans l’action et de mettre en pratique sans délai les comportements que l’on attend des autres.
Le grand secret de l’épanouissement
Quand vous en êtes là, à mettre en place chaque jour des actions qui vont dans le sens qui vous ressemble, la tentation est forte de guetter l’apparition de l’épanouissement. Suis-je épanoui ? Pas encore ? Un tout petit peu ? Et plus vous y pensez, moins vous vous sentez épanoui. Serait-ce la faute à mon travail qui ne me convient pas ? A ma collègue rabat-joie ? Suis-je carrément incapable de m’épanouir ?
A ce moment-là, vous saurez que vous êtes tombé dans le piège ! Le piège de la volonté. En coaching, on appelle ça le paradoxe du « soyez spontané ! », parce que être épanoui, comme être spontané, ça ne se décrète pas. Et au contraire, à partir du moment où vous décidez d’être spontané, vous ne l’êtes plus !
Ce qui est terrible, c’est que nous sommes nombreux à vous vendre de l’épanouissement et donc à entretenir le piège (oups !). C’est normal, ça s’achète particulièrement bien !! Mais nous ne sommes pas dupes - et vous non plus -, l’épanouissement ne s’achète pas plus qu’il ne se vend car au fond, vous êtes le seul à pouvoir créer les conditions favorables à son apparition. Et surtout, plus que ça, vous êtes le seul à pouvoir définir la recette exacte pour vous épanouir. On peut toujours vous donner la liste des ingrédients principaux – l’eau, la farine, le beurre et les œufs – mais le dosage, la qualité des ingrédients et la touche personnelle devront varier selon votre goût.
Et c’est là le point de départ de la réflexion que vous devez mener pour identifier comment vous épanouir au travail :
Quels sont les ingrédients nécessaires à votre épanouissement et dans quelle proportion ?
Pour la suite, venez en discuter en coaching, nous chercherons ensemble les 5 clefs qui seront utiles dans votre poche pour tendre vers une vie épanouie, au travail et ailleurs. Parce que la distinction vie privée / vie perso me paraît inappropriée quand on parle d’épanouissement : vous ne vivez qu’une seule vie, la vôtre. Et s’épanouir c’est un état d’esprit que l’on adopte ou pas, quel que soit le domaine de sa vie.
Je vous encourage donc à vous familiariser avec votre propre vision de l’épanouissement, puis à passer très vite à la concrétisation en transformant chaque élément de cette vision en acte concret !
La méthode pour s’épanouir au travail
Finalement, si je récapitule ce qu’on vient de voir ensemble, je dirais que pour parvenir à s’épanouir au travail, il y a 6 étapes à franchir, voici comment s’y prendre :
- S’autoriser à être Soi et à vivre en accord avec ses propres aspirations
- Statuer sur l’envie réelle d’agir pour s’épanouir
- Définir les ingrédients de votre épanouissement
- Agir chaque jour pour tendre vers une vie plus épanouie selon votre propre définition
- Prendre du recul pour mesurer les résultats de vos efforts et recommencer le cycle à l’étape 1
- Faire bénéficier les autres de vos apprentissages et de votre nouvel état d’esprit
En d’autres termes, l’idée est de commencer par nous occuper de nous pour améliorer notre quotidien en passant à l’action le plus rapidement possible. Par exemple, qu’allez-vous faire pour vous dès que vous aurez fini de lire cet article ?
Et c’est véritablement la meilleure façon de vous épanouir : aller vers ce qui est important pour vous, satisfaire vos besoins et agir dans le sens de vos valeurs le plus régulièrement possible.
Appliquez ce principe pendant vos deux prochaines semaines de travail et voyez ce que cela change. De cette façon, vous verrez aussi mieux la façon dont votre environnement et vos tâches influencent votre épanouissement. Et vous serez donc plus à même d’évaluer votre besoin de changer de boulot ou de changer de métier.
A mon sens, si chacune des personnes ayant envie de construire une vie plus épanouie au travail agit pour son mieux-être, il y a de fortes chances que toutes finissent par se rencontrer et puissent ainsi modifier en profondeur le cadre de travail de nos entreprises.
Au fil des entretiens que j’ai avec mes clients, je me rends compte que nous sommes très nombreux à partager une même vision du monde idéal, nous n’avons donc plus qu’à coopérer en faisant vivre cette vision dans notre quotidien. Imaginez par exemple que Véro – pour qui le besoin de reconnaissance est très fort – se mette à offrir à ses collègues et à son chef des feedbacks à la fois sincères et complets sur leurs réalisations de la semaine, que pensez-vous qu’il se passera pour elle au bout de quelques semaines ?
Peut-être que si nous nous engagions vraiment à agir pour respecter notre vision d’un monde épanoui dans notre quotidien, nous aurions plus de facilité à construire des projets communs, plus d’entrain à mettre en œuvre des idées sans but lucratif, plus d’occasion de faire parler notre humanité. Peut-être que nous serions même encore plus épanoui que nous n’aurions pu l’imaginer !
Mais bien sûr, pour réussir à s’engager sur ce chemin, il faut accepter que rien n’est jamais acquis, que tout est une histoire de tentatives, d’échecs, d’égarements, de recommencements, que c’est une quête infinie et que tout se joue dans l’instant pour maintenir un équilibre et tenir dans la durée.
Parce que le seul moment pour vous épanouir, c’est maintenant.
Au plaisir de lire vos commentaires,
A bientôt sur Cap Cohérence,
Annabelle
PS : N’hésitez pas à partager cet article avec tous les Henri, Laurent et Véro de votre entourage, cela ouvrira peut-être une porte dans leur esprit et une opportunité de parler à cœur ouvert avec eux. :)